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« Qu’as-tu fait à l’école aujourd’hui ? » « J’ai joué, j’ai mangé, je ne sais plus... » 
« Et demain, c’est le jour de la bibliothèque ? » « Je ne sais pas... » 
Questions ordinaires... Réponses ordinaires...

Et puis, il y a ces petits qui reprennent leur cartable du vestiaire lorsqu’on leur demande d’aller chercher leur manteau, car ils pensent que c’est le moment de rentrer à la maison alors que nous sortons simplement en récré... et ceux qui, à la moindre occasion, demandent si c’est bientôt « l’heure des mamans ».

Le temps des questions

Les petits seraient-ils à ce point en dehors du temps qui passe ? La journée vécue, son déroulement, le rythme des activités régulières ou occasionnelles leur échapperaient-ils vraiment ?
Et pourtant, leur vie est déjà bien rythmée : le mercredi, « c’est la petite journée », après le repas de midi, c’est toujours la sieste pour les plus jeunes ou « la grande récré » pour les plus grands, la séance de psychomotricité a toujours lieu le même jour à la même heure, idem pour le début ou la fin de la journée....
Et pourtant aussi, il suffit de les écouter pour constater qu’ils sont demandeurs : « C’est quand la psychomotricité ? » « C’est quand le jour de la bibliothèque ? » « C’est la collation maintenant ? »

Face à des questions de temps, un agenda collectif comme réponse

Partant de ces constats, la gestion du temps pour et par les enfants a bien sa place en classe en maternelle. Et c’est dans ce sens, que dans ma classe, j’ai trouvé intéressant d’installer, à côté des différents calendriers dans lesquels nous notons les évènements du mois ou de l’année, un grand semainier reprenant les heures et les jours de la semaine. Ce semainier, grand agenda collectif à gérer ensemble, donne des points de repère pour pouvoir anticiper et être sécurisé, mais aussi pour apprendre que le temps passe avec ses évènements constants ou occasionnels, prévisibles ou imprévisibles, que notre vie est rythmée par des cycles au sein desquels nous pouvons aussi trouver la liberté d’agir.
Ce semainier aide les enfants à entrer dans la connaissance du temps qui passe pour qu’il ne soit plus un mystère à subir.
Dans mon idée première, j’en ai affiché le contenu d’après le contenu de mon journal de classe et un gardien annonce le matin le programme de la journée et déplace un curseur sur les différentes illustrations afin de permettre à tous de se situer dans le temps par rapport à la journée et la semaine.
Actuellement, ce semainier fait partie des institutions de ma classe. Nous en sommes à la deuxième version.

Le temps de construire et d’expérimenter

Dans sa première version, j’avais récupéré un grand panneau « Pan-terre » que j’avais transformé en tableau à double entrée : en haut (en colonnes), les heures ; sur les côtés (en lignes), les noms des jours de la semaine.
Pour que les enfants s’y retrouvent plus facilement, j’avais peint sept bandes horizontales définissant les zones attribuées aux différents jours de la semaine. Les couleurs n’étaient pas choisies au hasard : pour chaque jour de la semaine, une teinte que nous avions choisie ensemble : couleur « lune » pour lundi, « marron » pour mardi, couleur « mer » pour mercredi, « jaune » pour jeudi, « vert » pour vendredi, « sable » pour samedi et « dinosaure » (on s’était mis d’accord sur leur éventuelle couleur) pour dimanche.
Et dans les différentes zones-jours, j’avais fixé des crochets afin de pouvoir y accrocher les étiquettes « photos-mots » illustrant les différents moments de la journée. Sur ces étiquettes, les enfants pouvaient donc visualiser et lire le nom du moment « Accueil », « Bonjour », « Ateliers », « Histoire », « Musique, chanson », « Collation », « Récréation », « Psychomotricité », « Repas », « Sieste », « Promenade »,...
Dès le début de la semaine, avec l’aide de l’enfant « gardien de l’horaire », je plaçais les étiquettes de sorte que, dès le lundi, les enfants pouvaient avoir une vision du programme des jours suivants.
Et chaque matin, un enfant « le gardien de l’horaire » annonçait aux autres le programme de la journée. C’est lui aussi qui veillait avec moi, à mettre le tableau à jour en y accrochant, déplaçant, changeant les étiquettes. Les enfants ont tout de suite montré un grand intérêt pour ce nouveau rituel... à un tel point que j’en ai très vite trouvé les limites. Je découvrais des enfants bien rigoureux face à un tableau bien peu modulable !

Le temps de constater

Les enfants se montraient très pointilleux sur le respect du programme annoncé : pas question d’improviser la moindre petite chanson entre deux activités sans qu’ils ne me rappellent le programme prévu... Mes crochets étaient bien fixes et mes plages bien statiques... Que faire lorsque différentes activités se déroulaient simultanément ? Quelle difficulté à retirer ces étiquettes bien en place sur ces crochets ! Quelle difficulté d’être gardien du temps dans de telles conditions ! Et quelle difficulté pour moi de ne pas pouvoir trouver la réponse à apporter face à une telle rigueur !
Et pourtant, je voyais beaucoup d’avantages à cette nouvelle institution : le matin, face à certains gros chagrins, j’avais un nouveau moyen pour rassurer les petits en leur montrant à quel moment leurs parents allaient venir les rechercher.
Les moments tellement importants de la collation, des récrés, du repas, de la sieste, de la psychomotricité... étaient clairement affichés ; les plus grands pouvaient aider les plus jeunes à se situer dans le temps et ainsi, les rassurer.
Quelle belle occasion aussi, lors du rituel du matin, d’apprendre à construire un texte intégrant des connecteurs temporels, de travailler la conjugaison déjà ! « D’abord, nous avons eu l’accueil ; maintenant, c’est le bonjour ; et après, ce sera le moment des ateliers, puis la récré... et enfin, la fin de la journée ! »
Et, avant le retour à la maison, quel bel outil pour se rappeler les activités vécues tout au long de la journée, les apprentissages et l’ordre dans lequel ces activités ont été vécues.
Le tableau était bien peu modulable, mais l’idée était là, les enfants étaient demandeurs !
Cela valait vraiment la peine de l’améliorer !

Le temps d’ajuster

Et voilà qu’un autre chantier un peu plus important nous attendait : notre délocalisation (provisoire) pour cause de travaux de construction de nouveaux bâtiments.
Nouveau lieu, nouvel espace : une raison de plus de revoir cet affichage de l’horaire qui n’y trouvait de toute façon pas sa place.
Pour plus de flexibilité, j’ai utilisé sept panneaux aimantés, placés côte à côte : à chaque jour son panneau.
Au-dessus de chaque panneau, le nom du jour imprimé sur une bande de papier de couleur associée (les mêmes couleurs que lors de la version précédente, car dans ma classe verticale, la culture se transmet souvent d’année en année et donne parfois un petit caractère immuable, ou difficilement révisable à certaines organisations). Sur le côté, les heures.
Le lieu a changé : des nouvelles photos illustrent les mots. Et dans cette version, les étiquettes sont aimantées.
Dans une boite à tiroirs, la réserve d’étiquettes organisée par ordre alphabétique. C’est là que le gardien va se servir pour mettre le tableau à jour.
Cette formule permet davantage de souplesse par rapport à la formule précédente. Et les enfants peuvent le manipuler sans difficulté.

Le temps de faire le bilan (avant la suite ?)

Mon idée première d’afficher le contenu d’après le contenu de mon journal de classe reste bien présente et un gardien continue d’annoncer, en début de semaine, les activités spéciales, les tournantes qui organisent notre vie de classe. Il explique aussi chaque matin, le programme de la journée. C’est lui aussi qui, au fil de la journée, déplace un curseur sur les différentes illustrations afin de permettre à tous de se situer dans le temps par rapport à la journée et la semaine.
Sans aucun doute, cet horaire prend de la place dans notre classe. Non seulement par ses dimensions, mais aussi par l’importance qu’il revêt aux yeux des enfants : c’est notre agenda partagé. Il apporte la sécurité, il permet l’anticipation et le retour sur les évènements vécus. Le temps n’est plus subi, mais annoncé et discuté ; les enfants ont leur agenda partagé.
Et je ne peux que constater que le rôle de gardien du temps, changé chaque semaine, est très convoité... 

ps:

Ce qui est dit ici pour la maternelle est valable jusqu’à la fin de l’enseignement supérieur.