Le travail sur cette situation m’a éclairée sur 4 axes à questionner : quels changements pour quels objectifs ?, quelles conditions institutionnelles ?, quelles conditions humaines ?, quelles conditions matérielles ? Et je fais un lien avec le Pacte pour un enseignement pour l’excellence…
Quels changements pour quels objectifs ?
Dans les groupes du Pacte, des personnes discutent pour savoir tout ce qu’il faudrait faire pour que l’enseignement aille mieux. Elles se basent notamment sur le rapport d’un groupe (note) qui s’était penché sur les sens, missions et valeurs de l’école du 21e siècle. Mais qui s’est assuré que les conclusions de ce travail étaient effectivement partagées par les acteurs de l’enseignement qui devront les porter ?
Une des fonctions, implicite, de l’école est de distinguer (pour le dire poliment) ou de sélectionner (pour le dire plus crument). L’école fait ce travail sans qu’il ne fasse partie de ses missions officielles. Il y a là un objectif implicite que CGé veut dénoncer. Or le Pacte ne le dénonce pas suffisamment. Tant que ce ne sera pas fait, nous resterons dans des compromis et des demi-vérités.
Quelles conditions institutionnelles ?
Dans la situation décrite du « Creativ school Lab », du temps a été donné à une équipe pour organiser un espace, mais il n’y a pas eu de message explicite de la direction sur le mode de fonctionnement de ce projet. Il était donc difficile pour ce groupe de savoir qui était responsable de quoi devant qui.
Le flou institutionnel est une réalité à bien des endroits. Et, des d’acteurs ont intérêt à ce que ce flou soit maintenu pour pouvoir faire jouer leur influence.
Dans le rapport du Groupe Central du Pacte, la tension entre la volonté de laisser plus d’autonomie aux différents acteurs tout en les responsabilisant et la volonté d’arriver à plus d’égalité et donc de contrôler les processus qui permettent d’y arriver est présente. Favoriser l’autonomie tout en balisant clairement les objectifs demande du temps (conditions matérielles).
Quelles conditions humaines ?
« Dans tout changement, commencer par dire ce qui ne changera pas. », petit dicton du management pour les nuls. Ce principe permet deux choses : il offre une certaine sécurité aux personnes qui craignent le changement et il permet de nommer et donc de reconnaitre ce qui va bien et qui ne doit pas être changé, le travail accompli.
Dans l’exemple du School lab, la volonté était de créer un local neuf dans une « vieille » école. Faut-il faire des appels à projets vers le privé pour obtenir des subsides afin d’innover et de maintenir de l’emploi ? Voilà qui vient titiller la sécurité.
Dans le cadre du Pacte, les changements envisagés sont si nombreux et complexes qu’il est difficile de dire ce qui ne changera pas. C’est pourtant indispensable, car qui est prêt à tout lâcher pour l’inconnu ? Certains diront qu’on en est là, et qu’il faut tout lâcher. Les enseignants n’ont-ils pas besoin d’un cadre qui tienne bon et de savoir sur quoi ils peuvent s’appuyer pour continuer à faire leur métier ?
Quelles conditions matérielles ?
Du temps et des lieux. Après on peut discuter.
On a bien vu dans l’exemple du School lab à quel point trouver du temps commun était difficile. De plus la difficulté de déterminer dans quel espace ce School lab pourrait prendre place n’a pas facilité les choses.
Dans les dispositions envisagées par le Pacte, la dimension du temps a été régulièrement envisagée. Il faut plus de temps pour travailler en équipe, plus de temps pour accompagner, plus de temps pour être accompagné… Cela implique évidemment un autre rapport au temps de présence à l’école pour les enseignants, mais c’est un terrain délicat.
Quant aux lieux, on parle des nouvelles écoles qu’il faudrait construire vu l’augmentation de la population. Il faudrait que dans ces nouveaux espaces, des lieux de concertation et de travail soient prévus.
Finalement, les conditions du changement semblent faciles à énoncer : nommer explicitement les objectifs visés, faire preuve de clarté au niveau institutionnel, offrir une certaine sécurité, respecter ce qui existe et enfin garantir du temps et des lieux pour pouvoir s’approprier le changement. Or à lire ou écouter la presse généraliste, rien n’est fait : les objectifs ne sont pas nommés, on ne sait pas qui décide quoi, on met le focus sur le changement sans voir ce qu’on garde et tout va trop vite…
Il y a du boulot pour aller à contrecourant du prêt à penser médiatique…